Le Maroc se retire d’une zone contestée au Sahara occidental.
Le Royaume du Maroc a décidé de procéder à partir de dimanche 26 février 2017 à un retrait unilatéral de ses forces armées de la zone tampon qui sépare le post-frontalier de Gueguerat de la Mauritanie, pour se conformer aux recommandations du secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres
La région de Guerguerat, à la frontière avec la Mauritanie, était, depuis août 2016, le théâtre de tensions entre Rabat et les indépendantistes du Front Polisario.
En apparence, cela ressemble à un apaisement. Mais c’est surtout un nouvel épisode d’un dangereux face-à-face diplomatico-militaire qui se joue depuis 6 mois. Si le Polisario refuse de se retirer et continue d’entraver la circulation dans cette zone, l’ONU devra intervenir, et si elle ne le fait pas, gageons que le Maroc le fera.
Pour mieux comprendre les enjeux, un rappel historique :
1975 : L’Espagne signe le traité de Madrid avec le Maroc et la Mauritanie et s’apprête à quitter le territoire. Ce traité qui divise le Sahara occidental en deux parties, mauritanienne et marocaine, est signé sans consulter les concernés qui sont les sahraouis. Le Maroc contrôle, depuis 1975, environ 80 % territoire du Sahara occidental.
1984 : Le Royaume du Maroc quitte l’Organisation de l’Unité Africaine pour protester contre la reconnaissance par cette instance de la République Arabe Sahraouie Démocratique (RASD).
1991 : A la suite d´un accord auquel sont parvenus le gouvernement du Maroc et le Front Polisario, la MINURSO (Mission des Nations Unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental) a été établie et déployée en septembre 1991 afin de surveiller le cessez-le-feu et d´organiser un référendum qui permettrait aux habitants du Sahara occidental, habilités à voter, de décider du statut futur de ce territoire.
2016 : en août, le Maroc entreprend des travaux de goudronnage d’une partie du No Man’s Land, route frontalière entre la partie du Sahara occidental qu’il contrôle et la Mauritanie, distante de quelques kilomètres, officiellement pour lutter contre la contrebande (petit tronçon de 3,5 kilomètres qui était un espace de non-droit, et où s’activaient tous les trafiquants de petites armes, d’êtres humains, de drogue et de voitures.)
Les Nations unies s’étaient inquiétées des risques de dérapage de la situation. Un document confidentiel transmis fin août 2016 au Conseil de sécurité estimait que le Maroc et le Front Polisario avaient tous deux violé l’accord de cessez-le-feu de 1991, en déployant des hommes armés dans cette zone tampon.
2017 – Janvier : Le Maroc réintègre l’Union africaine après plus de 30 ans d’absence, en dépit de fortes réticences de poids lourds du continent (dont l’Algérie) liées à la question du Sahara occidental.
Jamais depuis 1991, le Maroc et le Polisario n’ont été si proches d’un affrontement armé, au point que la situation, jusqu’ici très tendue à Guerguerat inquiétait au plus haut point les chancelleries.
Vendredi 24 février – Le nouveau secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres a exhorté les deux parties (le Maroc et le Front Polisario) à retirer leurs troupes de la zone tampon le plus rapidement possible.
Dimanche 26 février – Le Maroc a fait savoir, sans donner d’explication, qu’il quittait cette zone : « Le royaume du Maroc procédera, dès aujourd’hui, à un retrait unilatéral de la zone » de Guerguerat, à la frontière avec la Mauritanie, a annoncé le ministère des affaires étrangères dans un communiqué. Le royaume n’en a pas dit davantage, mais son annonce devrait permettre « d’apaiser le climat dans ces quelques kilomètres de no man’s land » .
Dans un communiqué publié ce même dimanche, le Front Polisario a dénoncé ce retrait « de quelques centaines de mètres » comme de la « poudre aux yeux ».
Le Polisario avait accentué sa pression en imposant même une sorte de check-point de fait sur le tronçon routier dont il avait bloqué le goudronnage. Cela était devenu intolérable pour Rabat. Le Polisario avait même évoqué de tamponner les passeports des personnes en transit vers la Mauritanie, du sceau de la « RASD » et affirmer ainsi son autorité de fait sur la zone, n’excluant pas d’ailleurs de fermer le passage au besoin.
Notre expérience du passage de ce No Man’s Land, le 11 décembre 2016, dans le sens Mauritanie-Maroc : ici, sur notre page Internet.