Départ

Jeudi 25 avril – réveil à 4h15. On a la chance que notre hôtel propose un « early breakfast » on ne partira pas à jeun. Denis, notre chauffeur de taxi nous dépose à la gare d’Irkoutsk vers 7h15. La gare centrale d’Irkoutsk est située à 2 km du centre-ville, sur les rives de la rivière Angara. De son nom complet : Gare d’Irkoutsk-Passager (Иркутск-Пассажирский).
En 1898, la ville accueille le premier train de passagers en provenance de Krasnoyarsk. La gare a été rénovée et complétée plusieurs fois. Aujourd’hui on y trouve une billetterie, une salle d’attente, une consigne à bagages, des salles de repos, un poste de secours, des cafés et des petits kiosques, mais plus de vendeurs sur les quais. Vers 7h30 notre train est annoncé voie 1. On a juste à ressortir de la gare et nous n’aurons pas à accéder au quai par les passages souterrains en travaux.
7h45, nous sommes à bord, wagon 3, places 13 et 14 et à 5 185 Km de Moscou. 8h03, c’est reparti pour 3 jours et 3 nuits. Après le rythme effréné des quatre jours à Irkoutsk, le rythme lent du Rossiya jusqu’à Vladivostok va nous perturber un peu. je vais en profiter pour mettre à jour le récit de notre voyage sur mon carnet de voyage.

Baïkal

En partant très tôt, on a la chance de longer de jour et pendant plusieurs heures, le lac Baikal, encore gelé, et les hauts sommets enneigés. Un premier arrêt dans la petite gare de Slyudyanka. On est si près du lac qu’on pourrait presque le toucher. mais pas question de descendre, notre provodnitsa y veille, il n’y a que quelques minutes d’arrêt.
Les heures passent et nous ne nous lassons pas de ce magnifique paysage. Nous connaissons le Lac Baikal en été, pour y avoir séjournés en 2011 (reportage) et fait de la photo par cerf-volant. Nous avons aussi choisi de prendre le Transsibérien avant l’été, pour le découvrir transformé en une gigantesque banquise.

Le lac fait 636 Km du nord au sud, 80Km de large, avec une profondeur de 1637 mètres. Il contient près de un cinquième de la réserve d’eau douce de la planète, c’est plus que l’ensemble des 5 grands lacs de l’Amérique du Nord. Ici, vivent des espèces qu’on ne trouve nulle part ailleurs comme ces phoques « nerpa ». Le lac Baikal présente une valeur exceptionnelle ce qui lui vaut le surnom de « Galápagos de la Russie » ou encore « perle de Sibérie« .

Baïkal

Il faut vraiment préserver cette belle nature car aujourd’hui, le lac Baikal est menacé par la pollution. Les eaux usées des villages qui ne cessent de s’étendre, comme à Listvianka où en 2009, il n’y avait que huit hôtels, il y en a 82 aujourd’hui. L’unique station d’épuration ne suffit plus. A Baïkalsk, il y avait une usine de cellulose, fermée depuis 2013, mais qui a aussi contribué à la pollution du lac.
Mais pour l’instant nous profitons de ce spectacle féerique. Il y a des pêcheurs qui ont percé la glace pour y pêcher l’omul. Les petits villages de pêcheurs que nous croisons sortent de leur léthargie hivernale, des paysans s’affairent dans les jardins. Par endroit, la glace a commencé à fondre, laissant entrevoir le bleu profond du lac. Magnifique !! De charmantes maisonnettes en rondin de bois sont disséminées dans la forêt.

Oulan-Oude

14h39. Nous voici à Oulan-Oude. 23 minutes d’arrêt, alors nous descendons sur les quais. Patrick reprend le tournage de notre vidéo. Nous avons un super beau temps, la gare est en travaux. Notre nouvelle provodnitsa est sympa. Du mouvement dans cette gare, beaucoup descendent et quelques uns montent. Nous aurons des nouveaux voisins, dont Vivianne, qui voyage seule jusqu’en Corée pour rejoindre sa fille. On finira l’après-midi en discutant et en faisant quelques parties de jeux de société. Par cette belle journée ensoleillée, nous avons droit à un beau coucher de soleil. Les pins et les sapins ont finalement remplacé les bouleaux. Direction le wagon-restaurant, il y a de moins en moins de choix, mais les deux serveuses sont très souriantes.
La nuit va être un peu mouvementée, de violentes et bruyantes secousses nous réveillent en pleine nuit. Notre cabine est parfois un véritable shaker, les rails ne semblent pas toujours très bien ajustés.

De gare en gare

A la gare de Kouenga, à 6526 Km de Moscou, on bifurque vers le nord. La ligne du TransBaïkal continue sa route sur une cinquantaine de km. Il fait très chaud dans le train, 27°C, et pas moyen d’ouvrir une fenêtre. Nous changeons une fois de plus de fuseau horaire. Heureusement que l’on peut descendre de temps en temps sur les quais, se dégourdir les jambes et respirer de l’air frais.
C’est ce que l’on fait en gare de Chernyshevsk, avec un arrêt de 30 minutes. Cela nous laisse un peu de temps pour travers les voies, et acheter quelques bananes. Il est 8h50, il fait 2°C dehors, mais nous n’avons pas froid. Le trajet du train est de plus en plus sinueux. Nous roulons de plus en plus lentement. Nous longeons des rivières pas tout à fait dégelées.
Bizarrement, aujourd’hui, au deuxième jour de cette seconde partie de notre voyage sur le Rossiya, le temps nous parait un peu plus long. Peut-être moins de découverte à faire dans le train. Même dans les Platskart, 3ème classe avec des couchettes non compartimentées, le calme règne. Ce n’est pas l’ambiance délirante décrite dans les guides. Je pense que les réseaux sociaux ont détruits les relations sociales. Pratiquement tous les passagers sont sur leur téléphone ou tablette.
Nous arrivons à Mogocha, cité des orpailleurs. C’est surtout une ville exposée au climat le plus rude du monde. dans cette région de permafrost, les températures peuvent chuter jusqu’à -60°C. Nous ne sommes qu’à 50Km du fleuve Amour, frontière avec la Chine. Autrefois les trains de voyageurs étrangers devaient circuler les stores baissés, mais çà, c’était avant ! Nous arrivons à la gare d’Amazar, avec un peu de retard (c’est la première fois depuis Moscou). Sur le quai, pour la première fois, des vendeurs de poissons, de beignets de pomme de terre et autres gourmandises. Nous n’avons que 15 minutes.

Nos journées sont rythmées par les arrêts en gare, le paysage qui défile et nos repas. Ne rien faire n’est pas de la paresse mais juste une sorte de languissement. On arrive même à ne plus penser, comme en autohypnose.
L’un de nos wagons est peint et rend hommage à Karl Ivanovich Bogdanovich, né en 1864. Il mena de nombreuses études dans différentes régions de la Russie européenne, en Asie centrale, en Asie centrale, en Sibérie et dans le Caucase. Ses travaux au Kamchatka (1895-1898) ont jeté les bases des connaissances géologiques sur cette région éloignée.
En fin d’après-midi nous voici dans une drôle de gare : Erofei Pavlovitch. Un immense escalier bordé de deux sculptures de têtes de dragon, stylisées entre Dark Vador et Légo. Plus d’arrêt prolongé avant la nuit.

Nous sommes réveillés par l’arrêt du train. Il est 6h12, nous avons bifurqué plein sud. On se précipite pour descendre, stoppés net par notre provodnista « no station »…. effectivement, le train repart après 3 minutes d’arrêt (gare de Svobodny). Nous traversons une immense rivière : la Zeia, par le deuxième pont le plus long sur la ligne du Transsibérien.
Comme tous les jours, notre provodnista fait le ménage. Elle s’occupe du wagon comme de sa propre maison. Il y a aussi deux jeunes femmes de la police ferroviaire qui circulent régulièrement dans le train sur sa longueur.

7h15. Belogorsk. Nous sommes dans l’Oblast de l’Amour. Grand soleil, trois kiosques et la statue de Lénine. De cette gare, certains trains bifurquent pour relier la Chine en bateau. A 8140 Km de Moscou, le train emprunte un long tunnel de 2Km, c’est le plus long sur cette voie.
Je ne sais pas si il est 13h ou 14h mais c’est notre dernier changement d’heure. Nous voici en gare d’Obluch’ye, région autonome juive. On est coincé sur un petit quai, pas très large, entre notre train et un train de marchandise. Nous ne verrons pas la gare. Seulement sur notre tablette, grâce à l’application Pocket Earth PRO, qui fonctionne complètement hors-ligne même avec le GPS, nous suivons régulièrement le trajet de notre train, le Rossiya. On a juste téléchargé les cartes nécessaires avant notre départ. Par endroit, le train fait de sérieux virages en épingle à cheveux, notre vitesse ne dépasse pas les 35 Km /h.

Le dernier  arrêt où l’on va descendre, il y en aura d’autres, mais de nuit : Gare de Khabarovsk. Il est 19h10. Un vieux monsieur nous propose des poissons fumés. Des colis sont déchargés. C’est une étape majeure sur le chemin de fer du Transsibérien. Un couple de Suisse monte à bord, nous passerons une partie de la soirée avec eux. Mais il est temps de regagner notre cabine, de faire nos valises et un peu de ménage. Demain matin, nous arriverons à Vladivostok. Ultime étape du Transsibérien.

Dimanche 28 avril. Notre provodnista s’assure que nous sommes bien tous réveillés. 7h10 – A 9 288 km de Moscou – Après 3 jours et 3 nuits et seulement 3 minutes de retard. C’était la seconde partie de notre voyage sur le Rossiya … Vladivostok, nous voilà !

Sur le quai, un vieille locomotive en très bon état, décorée d’un ruban rayé orange et noir. C’est le ruban de Saint-Georges, symbole de la victoire de l’Armée rouge sur l’Allemagne nazie, devenu symbole du patriotisme russe. Notre vie à bord du Rossyia en vidéo
Bon … sortir de la gare n’est pas évident, pas mal de marches … des marches c’est ce qui nous attend dans les jours à venir, mais çà c’est la suite de notre aventure à Vladivostok !!

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